Le quasi usufruit

Le quasi usufruit
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Le droit de propriété sur un bien est composé de trois éléments : le droit d’usage (j’utilise le bien), le droit d’en percevoir les fruits (j’encaisse les revenus d’un bien) et le droit d’en disposer (je donne ou je vends mon bien). L’usufruit confère à son titulaire (appelé « l’usufruitier») le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus. S’il porte sur un bien immobilier, l’usufruit permet à son bénéficiaire d’occuper personnellement le bien ou de le louer et d’encaisser les loyers.

Le droit d’en disposer appartient quant à lui au « nu- propriétaire », qui a vocation à devenir plein propriétaire à l’extinction de l’usufruit. Lorsque l’usufruit et la nue- propriété sont détenus par deux personnes différentes, on parle de démembrement de propriété. L’accord de l’usufruitier et du nu-propriétaire pour disposer intégralement du bien (le vendre, le donner) sont donc indispensables.

Quelle différence y a-t-il entre l’usufruit et le quasi- usufruit ?

Le quasi-usufruit est un usufruit particulier qui porte sur un bien consomptible c’est-à-dire un bien dont on ne peut pas faire usage sans le consommer.

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Dans ce cas, l’usufruitier peut disposer, comme s’il était plein propriétaire. Le terme quasi-propriétaire pourrait d’ailleurs sembler plus adapté que celui de quasi- usufruitier.

 Mais bien qu’il s’apparente dans ses attributs au droit de propriété pendant la durée du démembrement, le quasi- usufruit n’en est pas moins très différent : il s’impose le plus souvent aux parties par un événement ou une cause extérieure indépendants de la volonté de l’usufruitier et du nu-propriétaire et provient alors de l’application de la loi.

On peut par exemple citer le cas fréquent d’une succession avec un conjoint survivant usufruitier et des enfants communs : le survivant des époux peut alors disposer du droit en usufruit sur les biens composant le patrimoine du conjoint décédé. Si l’actif successoral contient des biens consomptibles (valeurs mobilières, sommes d’argent), il exercera alors un quasi-usufruit sur ces biens.

Le quasi-usufruit peut également naître de la volonté des parties. Il s’agit alors d’un quasi-usufruit conventionnel qui peut par exemple provenir d’une donation en nue- propriété dans laquelle il aura expressément été prévu que le donateur pourra exercer un quasi-usufruit sur le produit de cession issu du bien donné.

Au terme de l’usufruit, l’usufruitier devra rendre l’équivalent de ce qu’il a reçu au titre de son quasi-usufruit : des biens de même nature et quantité ou des biens différents mais ayant une valeur pécuniaire comparable à celle estimée au jour de la restitution.

Comment est valorisé le quasi-usufruit ?

La valeur fiscale du quasi-usufruit, utilisée pour les calculs de droits de succession ou de donation, est la même que celle de l’usufruit classique : un barème dégressif selon l’âge de l’usufruitier dans le cas d’un usufruit viager ou 23 % de la valeur en pleine propriété par période de 10 ans dans le cas d’un usufruit temporaire.

La créance de restitution

Le quasi-usufruitier a donc l’obligation de restituer ce qu’il a consommé à la fin de l’usufruit, cette restitution pouvant prendre la forme d’une restitution en nature ou en valeur au profit du nu-propriétaire qui bénéficiera en conséquence d’un droit de créance sur la succession de l’usufruitier appelé créance de restitution.

Les droits du quasi-usufruitier sont donc limités par la créance de restitution. Néanmoins, cette créance ne devra être remboursée au nu-propriétaire qu’au terme de l’usufruit (c’est-à-dire soit au terme de la durée fixée en cas d’usufruit temporaire, ou au décès de l’usufruitier si l’usufruit est viager).

Il existe un bémol à cette situation : si le patrimoine du quasi-usufruitier à son décès est insuffisant pour rembourser la créance de restitution, le nu-propriétaire sera alors créancier d’un montant irrécupérable en tout ou partie et n’aura aucun recours.

La loi ne prévoit en effet pas de garantir le paiement de la créance. Dès lors, si rien n’est prévu lors de la mise en place du quasi-usufruit, la protection du nu-propriétaire reste relative et dépendante de la bonne gestion du patrimoine du quasi-usufruitier.

Il existe tout de même des obligations protectrices pour le nu-propriétaire mais qui ont leur limite : elles ne sont pas d’ordre public et sont conditionnées à la rédaction d’une convention de quasi-usufruit qui peut prévoir des garanties protectrices du nu-propriétaire ou, au contraire, dispenser le quasi-usufruitier d’en fournir. Le choix de demander ou non des garanties dépendra notamment des relations entretenues par l’usufruitier et les nus-propriétaires.

La créance de restitution naît au jour du décès du quasi-usufruitier et elle constitue à ce titre un passif de succession.

Est-elle pour autant fiscalement déductible pour le calcul des droits de succession ?

Oui si elle provient d’un quasi-usufruit légal.

S’il s’agit en revanche d’un quasi-usufruit conventionnel, la régularisation d’une convention de quasi-usufruit est indispensable.

La déductibilité et la distinction entre quasi-usufruit légal et conventionnel n’étant en effet pas prévue par la loi, mais simplement par la doctrine, le principe étant la non- déductibilité en l’absence d’acte enregistrant la dette et la créance de restitution.

Nous conseillons d’ailleurs vivement de préférer l’acte authentique chez un notaire, ce qui confèrera date certaine et force probante à l’acte, point très important surtout en cas de contrôle de l’administration fiscale.